Spécialement destiné à l’éclairage précis des plateaux de TV, à soigner des captations et prises de vues de concert, le T1 (prononcez T-One à l’anglaise) est le dernier petit bijou du constructeur Tchèque. Il a été développé suivant les préconisations et les demandes pointues des directeurs photo.
Au programme, moteur de leds 5 teintes, module couteaux et des options inédites d’accès directs à la colorimétrie qui font déjà l’unanimité des dir phot ! C’est en effet par son moteur de leds de 550 W à multiples couleurs que le T1 se distingue de la concurrence, 5 pour être précis.
Un équilibre de rouge, vert, bleu, ambre et « lime » (vert-citron), gérés en natif qui permet toutes les couleurs possibles en additif, mais également d’offrir des caractéristiques colorimétriques tout à fait spéciales et garantit le respect des couleurs.
Robe a mis un accent tout particulier sur l’IRC, qui va permettre à l’éclairagiste de télévision d’obtenir la lumière satisfaisant à ses besoins précis, sans avoir besoin de recourir à des ruses de Sioux. En effet, T1 délivre une lumière dont l’IRC peut être ajusté de 77 à environ 90 par simple action d’un canal DMX.
La lumière est stable. Toutes leds alimentées à fond en blanc, le flux se stabilise en moins de 5 minutes. Dans les deux modes de contrôle les plus étendus, la fréquence d’alimentation des sources leds est ajustable finement de 300 à 2400 Hz. Deux canaux DMX sont affectés à une correction des « verts » (minus green) proportionnelle et active.
Bref, si vous avez de la lumière qui flicke aux caméras, ou si vous révélez une couleur abominable avec le T1, c’est que c’est un effet que vous voulez obtenir… mais il faut vraiment le faire exprès pour se louper… Aucune autre machine à notre connaissance ne dispose d’autant d’outils de réglage accessibles aussi facilement.
Construction du T1
[private]
La construction de la machine est au standard des grands classiques de Robe. Le design élégant et fin rappelle les autres modèles de la marque. Le T1 est compact et équilibré. Il pèse moins de 25 kg et son transport est facilité par deux poignées situées sur sa base.
La belle pièce d’optique que constitue la lentille de sortie est étonnamment pourvue d’un porte-filtre, accessoire peu courant sur un automatique, surtout pour un modèle censé offrir de multiples et abondantes capacités dans l’exercice difficile du contentement des directeurs photos les plus tatillons…
En tout cas, ce porte-filtre ne manquera pas de rassurer quelques anciens, qui ne jurent que par leurs frosts spécifiques ou leurs astuces ultra secrètes.
La base toute petite et fine, comporte d’un côté le panneau de connectique, et de l’autre, l’afficheur tactile du menu, ses 4 boutons d’action, et un port USB permettant les mises à jour du software de l’engin. Le dessous du socle reçoit les encoches de fixation des oméga d’accroche, et un point d’accroche pour l’élingue de sécurité.
Tout se démonte ou presque, à l’aide d’un tournevis cruciforme. Les deux larges capots qui entourent la tête se retirent à l’aide de deux vis quart de tour imperdables. Détail intéressant, l’intérieur de la partie avant de la tête, contenant les effets, est quasiment hermétique à toute intrusion.
Point de grille, point de ventilation avec ou sans filtre, toute cette partie n’est pas concernée par la moindre turbine, celle-ci étant exclusivement destinée à refroidir l’arrière du module LED. Ça permet donc de réduire l’introduction de poussières vers les lentilles et les modules d’effets. Avant même de parler d’entretien, on sait qu’il sera bien plus réduit que sur d’autres machines et c’est très bon point.
Les plateaux de télévision en France étant étonnamment et presqu’exclusivement attachés à de calamiteuses machines à brouillard à huile et compresseur, les prestataires qui fournissent la télé savent à quel point les appareils reviennent ruisselants d’huile en interne. Le T1 présente donc un sérieux avantage en termes de maintenance qui sera probablement réduite.
La partie arrière est occupée par le module des sources leds. Elles sont montées sur 3 faces internes de la boîte à lumière en forme de parallélépipède et dirigent leur flux à travers des lames dichroïques disposées en croix. Le mixage de lumière en sortie est ensuite collimaté par une optique alvéolée qui canalise le flux vers la tête et ses effets.
De larges radiateurs traversés par un beau réseau de caloducs entourent la boîte à lumière. Deux ventilateurs poussent l’air frais vers les radiateurs, et deux autres, sur l’autre face, extraient l’air chaud.
Les trois modules, un pour les gobos, un pour les couteaux et l’iris, et un pour la partie zoom / focus + frosts et prismes, se démontent tous et assez facilement. Ils sont installés comme des cartes sur slot.
Chaque module est fixé par deux vis imperdables et raccordé à l’électronique par des petits connecteurs, sauf le module couteaux, qui en plus, bénéficie d’un traitement particulier puisqu’il a également une connexion de deux fils volants sur un bornier à vis de type « domino » ! Voilà le type de solutions peu industrielles que l’on peut rencontrer quand on teste le prototype d’une machine.
Pas de module couleur dans la tête puisque, comme vous le savez, on est en présence de sources leds qui gèrent les couleurs en natif. Mécaniquement ça représente quelques avantages, comme celui d’éviter la présence d’une complexe et lourde mécanique de trichromie et de roue de couleurs.
Le module placé en sortie de la boîte à lumière comporte la roue d’animation et la roue de 7 gobos verre rotatifs qui se démontent facilement à l’aide d’un petit clip situé au fond du barillet.
Sur ce module se trouve également une petite lentille dont le réglage très précis réalisé à l’usine permet d’aligner le faisceau.
Les gobos sont sur de petits barillets extractibles juste clipsés autour de la roue crantée qui les maintient en place. Ainsi il est facile d’en enlever un pour le remplacer tranquillement et venir replacer le système dans son logement sur la roue, sans démonter la lyre pour autant.
Le module iris / couteaux arrive ensuite avec ses astucieuses biellettes, tel qu’on peut le retrouver sur différents produits de la marque et dont la versatilité n’est plus à démontrer. L’iris, avec sa quinzaine de lames, vient compléter le système au cœur du module couteaux.
Le module à l’avant comporte le zoom et le focus, ainsi que les frosts et le prisme. On peut noter le soin apporté à certains détails comme certains éléments de visserie ou de tringles alu recouverts de feutrine noire pour éviter tout reflet malheureux.
Les bras motorisés des frosts et du prisme à 6 facettes ont été installés directement sur les éléments optiques en mouvement et peuvent ainsi s’insérer dans le faisceau quelle que soit leur position sur le train optique. Exit les compromis qu’on a parfois pour obtenir tel ou tel effet à différentes ouvertures de zoom. Aucun conflit mécanique n’est possible ici. Ça marche dans tous les cas de figure. Le prisme est rotatif. Un petit moteur déporté l’entraîne via une courroie.
Les deux frosts sont équivalents à un 132 et à un 119 de Rosco, le 119 étant interchangeable aisément car mis en place par simple aimantation, avec d’autres frosts fournis en option chez Robe
Tous les éléments de ce module (lentilles de zoom, focus, frost, prismes…) sont tellement accessibles qu’il n’y aura probablement pas besoin de le démonter pour effectuer le nettoyage habituel lors de la maintenance standard. La conception est réellement bien fichue.
Dans les bras de la Robe
Les bras se démontent également très facilement à l’aide de quelques vis imperdables, et laissent découvrir d’un côté la motorisation TILT avec son renvoi par courroie et son réglage de tension via une poulie sur élément maintenu par ressort, le moteur prenant place dans le bas de la lyre. Le démontage d’une plaque de maintien sera nécessaire pour remplacer éventuellement la courroie si le besoin s’en fait sentir. L’autre côté du bras comporte le passage du câblage depuis le socle et jusqu’à la tête.
Le socle, l’alim.
Le socle est très dense et très compact. Il abrite deux d’alimentations bien spécifiques, une pour les sources leds, et une pour la motorisation.
Le display est tactile, mais il est aussi contrôlable par 4 boutons. Il est alimenté par batteries ce qui permet de configurer la machine hors tension.
Menu, une gestion classique et efficace
Le menu est clair et simple d’accès. La page « Addressing » permet de configurer la machine, à commencer par simplement l’adresser en DMX sur les 3 différents modes dont elle dispose pour être pilotée. On peut aussi déterminer les configurations et assignations des différents autres modes de gestion possibles : ArtNet, sACN, MA-Net.
Avec le menu « Info », on accède aux informations sur l’état de la machine, le nombre d’heures total de fonctionnement, le nombre d’heures total de fonctionnement du module leds, l’état de température de ces derniers (carte par carte, s’il vous plaît !), les différents repères de maintenance, etc…
Le menu « Personnality » permet de déterminer les différentes options de fonctionnement du T1. On peut ici configurer les courbes de dimmer, le mode simulation d’une lampe tungstène (6 courbes, une en réponse immédiate, et 5 simulant une lampe à filament, allant du type 750 W jusqu’à 2,5 kW), la sélection du mode de mixage couleur (RGB, CMY ou chromatique), les inversions PAN et TILT, le mode normal ou « théâtre » qui va gérer le bruit avec une réduction drastique de la ventilation, etc. Bref, un menu très complet. Sans oublier qu’un bon nombre de fonctions sont réglables à distance, même sans RDM, juste par le sixième canal DMX « Special Fonction ».
Et la lumière ça dit quoi ?
Pour attendre la stabilité du flux nous commençons par le derating.
Toutes leds du projecteur allumées à pleine puissance, nous mesurons la valeur de l’éclairement au centre du faisceau à froid, T0, puis à 30 secondes qui sert de valeur maxi de référence.
Et ensuite toutes les 5 minutes jusqu’à obtenir la stabilité de l’éclairement. On en déduit le temps de stabilisation du flux lumineux ainsi que sa valeur minimale à chaud. La T1 se stabilise en moins de 5 minutes avec une atténuation de 9 %.
Mesures faisceau serré au plus petit net
Positionné à 5 mètres de la cible, nous mesurons un angle de 8,9°. L’éclairement au centre à froid 23 220 lux (21 520 lux après derating). Le flux est de 10 000 lm à froid (9 080 lm après derating)
Mesures faisceau 20°
Pour un angle de 20°, notre valeur comparative, on mesure 4 480 lux à froid au centre (4 100 lux à chaud), et après nos calculs on obtient un flux de 9 520 lm à froid (8 710 lm après derating).
Mesures faisceau large au plus grand net
Le plus grand net correspond à un angle de 48°. Au centre on relève un éclairement 825 lux à froid (753 lux à chaud) et l’on calcule un flux de 9760 lm (8 920 lm). Le flux du T1 est tout à fait honorable concentré sur les capacités d’adaptation aux exigences de la captation vidéo ou télévision.
Ce projecteur diffuse une lumière impeccable, une gestion de l’IRC ultra-souple et fiable, une gestion de la température de couleur précise et infaillible. L’équilibre global est vraiment très intéressant, car le flux est globalement identique sur toute la plage du zoom.
Le zoom
Nous mesurons une plage de zoom de 8,9° au plus petit net jusqu’à 48° au max. Ce zoom est rapide et précis, on aime. Le faisceau est très homogène, la répartition de la lumière a été remarquablement bien travaillée.
Quant au focus, rien à dire. Le net est parfait, la focalisation des effets se fait sur la majorité de la plage d’ouverture de zoom et sur une distance tout à fait utile et raisonnable. Que ça soit sur la roue de gobos / animation et même avec l’adjonction de prisme, R.A.S.
Le dimmer
Le dimmer est une commande qui agit directement sur la puissance des leds. Nous avons tracé la courbe « square » qui est la plus utilisée. Elle est splendide, régulière et lisse.
On peut également, comme c’est le cas sur le DL7S, configurer la machine pour que ses sources répondent en simulant l’inertie du filament de différentes ampoules (les halogènes 750 W, 1 kW, 1,2 kW, 2 et 2,5 kW), dont les caractéristiques sont émulées à en bluffer un éclairagiste de théâtre !
Nous arrivons dans « le vif du sujet » les couleurs
Comme vu précédemment, le T1 a 3 modes. Les deux premiers modes, en 49 et 33 canaux, gèrent les couleurs en CMY ou RGB. Le mode 1 est simplement plus étendu que le 2 par l’ajout de canaux de contrôles fins supplémentaires, certains étant doublés pour l’usage en 16 bits.
Le troisième mode de 53 canaux est assez semblable au premier mode, à ceci près qu’il gère les couleurs différemment, en donnant accès à chaque couleur native du T1. Pour moi, s’agit d’un mode d’accès total type « laboratoire » mais qui n’apporte pas grand-chose à l’éclairagiste en encodage sur site. Les deux premiers modes permettent également d’exploiter pleinement les capacités de la machine, et finalement dans 90 % des cas, c’est ce qui va compter.
Les couleurs sont très belles, elles sont riches et saturées pour les couleurs denses, et toutes les teintes intermédiaires sont magnifiques également. Les CTO sont remarquables, l’équilibre des sources permet toutes les nuances de pastels possibles et imaginables.
Robe propose aussi son système « data swatch » (uniquement en modes étendus) qui permet sur un canal (et si la librairie est bien faite sur la console, c’est plus simple !) de sélectionner 237 couleurs parmi les plus utilisées, des « références » standard qui vont permettre de gagner du temps selon les demandes des directeurs photo. Si on vous demande un 120 ou un 204, pas besoin de bricoler « à l’œil » et de proposer votre sauce qui sera ensuite validée ou modifiée, vous avez la possibilité d’appeler directement la couleur du nuancier.
En plus elles ont l’air de correspondre assez précisément. Si on prend en compte la stabilité de la lumière du T1, il est probable que dans le cas présent, ce qui a toujours été un gadget plus ou moins précis, soit en fait un réel outil fiable. Le CTO étant électroniquement géré pour être considéré comme indépendant du choix de couleur, là aussi aucune surprise, c’est top !
Ajoutons également que parfois certaines machines à leds laissent voir de petites irrégularités dans un faisceau de contre vu en volumétrie, suivant les valeurs de zoom. Ici, comme il s’agit de couleurs gérées directement à partir des sources et que l’optique tient vraiment la route, le faisceau est homogène quelle que soit l’ouverture de zoom, quel que soit le positionnement du focus. Point de teintes différentes qui apparaissent sur les bords. C’est précis et net.
Nous arrivons aux réglages directement accessibles qui séduiront instantanément les directeurs photo. Sur deux canaux DMX, on va pouvoir gérer, sur la base de tout état lumineux, la température de couleur de façon tout à fait remarquable et linéaire. Sur un autre canal, on va pouvoir, simplement de 0 à 100 % déterminer l’IRC entre 70 et 90.
Si vous avez l’habitude d’avoir dans l’intercom les gens de l’image, vous pouvez leur donner toute satisfaction en quelques secondes, en leur fournissant instantanément ce qu’ils demandent. Et ces paramètres sont applicables immédiatement sur les machines et ce, pour l’ensemble des caractéristiques de lumière de l’appareil, car l’électronique tient compte de ces données quoi qu’on fasse d’autre sur le faisceau, y compris n’importe quel changement de couleur. Très fort.
Les gobos
Les 7 gobos sont rotatifs et indexables. Le choix de leur design laisse à envisager qu’ils ont été étudiés principalement pour de jolies projections car en volumétrie, ils fournissent quasiment tous le même effet de « breakup » plus ou moins fin…
La roue d’animation, faite de stries orientées à 90° les unes des autres est du plus bel effet et propose un réel huitième gobo.
Le prisme à six facettes va permettre un bel étal de projection. Plusieurs machines projetant sur un fond, un cyclo ou un décor, avec le prisme, pourront créer des textures amples et larges.
Les frosts permettent de flouter soit légèrement, soit fortement le faisceau. Le mélange des deux, comme à l’accoutumée ne paraît pas apporter grand-chose mais il existe !
L’iris, en dehors de ses capacités à ciseler le faisceau assure des effets très dynamiques. Il est très rapide et constitue un vrai plus pour créer des effets avec le T1.
Ça coupe de partout !
Le module couteaux reprend les bases de celui du DL7S qui est tout à fait remarquable. Modification intéressante cependant, les couteaux rentrent « droits » dans le faisceau. En général, sur les modules couteaux, les lames rentrent en biais dans le faisceau, et l’on doit faire tourner tout le module pour voir un « carré » (et non un losange, si on part d’une position droite, comme celle d’une face par exemple).
Dans le T1, le module est directement disposé pour obtenir une fenêtre perpendiculaire à l’axe de la machine, et l’amplitude de rotation est de 60° de chaque côté (120° en tout donc).
La précision est aux rendez-vous, les couteaux vont vite, ils vont même très vite, et peuvent aussi bien jouer en effet qu’en découpe de zone d’éclairage. Mais on ne retrouve pas le canal dans lequel il y avait des macros d’effets de couteaux. Dommage. Comme pour tous les systèmes à fermeture totale, le net absolu n’est pas faisable sur toutes les lames, mais il peut au moins être très semblable sur les couteaux en vis-à-vis.
Les mouvements de la lyre
Sans surprise, la machine répond bien à toutes les commandes de déplacement. Pour une bestiole de cette taille, les mouvements peuvent être assez vifs et assurer des changements rapides de position. Le déplacement lent est propre et limpide, sans le moindre à-coup. Robe annonce que le T1 est équipé de son système EMS « Electronic Motion « Stabilizer » qui compense toute perturbation de mouvement.
Conclusion
Le T1 est un joli projecteur dont les caractéristiques de couleur et de lumière devraient faire l’unanimité auprès des directeurs photos et gens de l’image en télévision et en captation vidéo. Les réelles innovations apportées à la gestion de la colorimétrie, de l’IRC sont un vrai plus qui met le T1 dans une position à notre connaissance unique.
Cette souplesse d’adaptation aux conditions de prise de vue en fait une machine qui fera gagner un temps énorme dans ce domaine où les demandes sont de plus en plus pointues et spécifiques.
D’autre informations sur le site Robe lighting France
On aime :
- Les capacités idéales d’adaptation de la lumière par rapport aux besoins d’une captation.
- Les couleurs magnifiques.
On regrette :
- L’absence de variété d’effets volumétriques
Tableau général
[/private]