Annoncée comme une grosse machine polyvalente garnie d’à peu près toutes les caractéristiques des lyres à faisceau net / beam / Wash / couteaux, je la voyais seulement comme une variante probablement sympa, de la Scenius Spot ou Profile.
Après le test et surtout après l’avoir utilisée en Live, elle m’est apparue comme CELLE qui définit le mieux la gamme Scenius.
Voici donc décrits mes deux tests, un banc d’essai classique et le test live de cette machine dont j’avais lors d’un festival 12 exemplaires à disposition dans mon kit lumière. Voyons un peu…
Construction de la machine…
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Le Scenius Unico reprend le type de construction que nous avons déjà décrit à différentes occasions pour ses frères Scenius Spot et Scenius Profile, avec leurs carters finement striés d’effet « carbone » et une ligne élégante. Ce n’est pas une « petite machine ». Elle est assez imposante et pèse un peu plus de 45 kg. La construction robuste de l’appareil y est pour beaucoup, et finalement c’est rassurant aussi (vidée de ses modules de la plupart de ses carters, la « carcasse » avec lentille de sortie, boîte à lumière et alim pèse à elle seule 30 kg !). On a trop vu des projecteurs dont la fiabilité est mise à mal au fil du temps par l’absence de robustesse de certains éléments au profit d’une recherche de légèreté à tout prix. Là c’est un bel engin, costaud et bien construit.
Les capots se démontent facilement à l’aide de vis quart de tour imperdables, et sont maintenus en sécurité par une petite élingue dont l’extrémité est fixée à la machine par un petit ergot de type « camlock » qui se retire facilement (bien vu dans l’idée car on a souvent affaire à des petits mousquetons dont l’action est parfois très pénible), mais qui se remet parfois assez difficilement (ça peut même sérieusement jouer avec les nerfs…). Pour le coup, j’apprécie la conception interne de cette machine qui facilite son entretien.
Une fois les carters retirés, il suffit de déployer sur leurs charnières les ventilateurs qui enrobent le module d’effets, et la carte électronique située au-dessus du module de zoom/focus pour avoir accès à l’intégralité des modules, tous extractibles en quelques secondes, après le débranchement de quelques connecteurs type Sub-D.
En 3 minutes, la lyre est réduite à une carcasse d’alu. C’est un vrai bonheur pour tous les techniciens qui auront la charge de nettoyer ces appareils entre deux dates de tournée, entre une série de prestations ou après un son & lumière dans des conditions difficiles…
Bref, ce qui est parfois une vraie purge à réaliser est ici vraiment simple. Même la partie zoom / focus est totalement accessible (et c’est suffisamment rare pour être salué !). Le seul élément à ne pas être démontable est le dimmer, situé en sortie de « boîte à lumière », juste devant la lampe avec le filtre anti-calorique.
A l’intérieur de la tête, tout tient sur trois modules
Le premier module, juste après la lampe, c’est la trichromie et le CTO progressif, pourvus de larges doubles rideaux de verre dichroïque, finement découpés en arrondi et striés en arc de cercle pour offrir une parfaite progressivité linéaire à son introduction dans le faisceau. Cyan Magenta, jaune, CTO, 4 étages de couleurs mixables.
Le deuxième module, le plus dense des trois (4,5 kg le pépère ! Y’a de la ferraille là-dedans, je vous le dit !), comporte les effets optiques tels que la roue de 6 gobos tournants indexables (facilement remplaçables grâce au système d’extraction rapide des barillets), la roue d’animation (on peut pratiquement parler d’une roue d’un Gobo « défilant »), l’ensemble du système de couteaux entièrement orientable, la roue de 7 couleurs complémentaires, les deux frosts, l’iris et un shutter pour les effets d’occultation stroboscopique.
Le troisième module, disposé juste avant la lentille de sortie, est constitué des lentilles du système de zoom, du focus, et du prisme.
L’accès à la lampe se fait par l’arrière, où il suffit de dévisser 4 vis imperdables quart de tours pour retirer la trappe d’accès et changer la lampe via le classique système « Lock-it ». Derrière cette trappe on a également accès aux réglages de base de la lampe.
Pour l’entretien, quelques vis nous permettent de retirer tout le capot arrière et offrent l’accès à l’intégralité de la boîte à lumière, et donc à la parabole en verre entourant la lampe, au dimmer et au filtre anti-calorique.
Dans les bras de la lyre, on trouve la puissante motorisation du Pan et du Tilt, située à la base et dont le mouvement est renvoyé par courroie jusqu’aux axes respectifs. Sur l’un des côtés se trouve une carte électronique gérant le software et des commandes moteurs diverses et acheminant tout ça vers la tête à travers l’axe du Tilt. La base comporte le classique écran de contrôle qui permet d’adresser la machine mais aussi de la configurer, et d’accéder à toutes les options dont elle est pourvue pour son pilotage et sa maintenance. L’accès à cette partie se fait par huit vis cruciformes.
Le socle est assez étroit et très « vide » : ballast électronique, gestion de l’afficheur, transfo d’alim, connecteurs et un peu de ventil, basta ! Il est loin le temps des énormes cartes mères et de la multitude de câbles qui en partait à travers les bras pour arriver jusqu’aux moteurs.
De larges poignées situées sur les côtés de cette base permettent une manipulation de l’engin aisée et équilibrée. La ventilation de la base utilise des grilles d’aération dissimulées par les poignées.
Ces grilles se démontent facilement pour retirer et nettoyer les mousses internes qui filtrent la poussière. Sous la base, on trouve les classiques points de fixation par camlock pour crochets Oméga d’accroche de la machine.
Configuration de l’engin
Toutes les configurations de l’Unico se font via le panneau de commandes situé à l’avant de sa base. Un large écran accompagné de 5 touches permet de circuler dans les différents menus du software. On y choisit traditionnellement le mode de la machine (un mode standard en 39 canaux DMX et un mode étendu « Vector » sur 43 canaux), son adresse DMX bien entendu, les différentes calibrations possibles pour toutes les fonctions permettant ainsi de régler finement les machines entre elles (sur un ensemble de machines, il est toujours impossible d’avoir TOUS les dimmers réglés d’usine de façon absolument identique par exemple, donc merci à cette fonction de calibration fine), la connectivité Art-Net et RDM souhaitée, l’accès manuel aux fonctions de la machine pour faire des tests éventuels, etc. Rien de nouveau par rapport aux frérots de la gamme Scenius, mais un menu très complet, lisible, clair, pratique. Nickel ! C’est ça qu’on veut !
La source, La lampe !
La jolie lampe fournie par Osram délivre une puissance de 1 400 Watts, annoncée pour une durée de vie de 750 heures, avec une température de couleur de 6000K et présentée comme ayant un indice de rendu des couleurs (IRC) très élevé.
Claypaky a développé l’Unico pour des applications live ou événementielles nécessitant une machine ultra-polyvalente avec un flux percutant. Le choix optique conduit donc à un faisceau un peu moins étale que celui des Scenius Spot et Profile, au profit d’une luminosité plus dense pour de l’effet allant du « beam » très serré jusqu’au spot très large.
Le Scenius Unico est le roi du gros « bâton » de lumière monumental et intense, pouvant se transformer avec une grande versatilité en un faisceau spot, ou même à la limite du Wash.
Et c’est plutôt réussi.
Les mesures
Faisceau serré
Projecteur positionné à 5 mètres de la cible sur laquelle nous effectuons les relevés, nous réglons le zoom à l’ouverture minimale. Au centre on note un éclairement très élevé de 252 000 lux, puis nous relevons les valeurs d’éclairement tous les 10 cm sur les 4 axes, haut, gauche, droite et bas.
Le flux est calculé par couronnes de 10 cm à l’aide de la moyenne des 4 mesures d’éclairement effectuées dans chacune d’elles. Pour obtenir le flux total, nous additionnons tous les flux jusqu’au bord net du faisceau. Le tableur Excel qui mouline les données nous indique un flux de total de 20 900 lumens.
La courbe d’intensité lumineuse tracée à l’aide des valeurs d’éclairement montre un vrai point chaud pour un bâton de lumière réellement impressif.
Mesures faisceau 20°
Pour notre mesure de référence à 20°, l’éclairement est de 29 200 lux au centre et le flux total s’élève à 32 100 lumens qui dépasse celui des Scenius Profile et Spot. Le centre reste marqué, c’est le prix à payer pour la polyvalence et un flux très élevé apprécié sur les grandes scènes.
Mesures faisceau large
On ouvre ensuite le zoom à 100%. On relève au centre 4060 lux. Le flux total pour 53,5° frôle les 30 000 lumens donc reste très proche de celui obtenu à 20° ce qui témoigne de la qualité de l’optique.
Petit souci de soft qui est certainement résolu, le dimmer manque de progressivité dans les premiers pourcentages.
Le faisceau
Pour ce qui est du faisceau, on a un rayon de lumière très intense avec la présence d’un point chaud assez sensible qui peut être atténué avec différents effets mixés. Ce point chaud peut déranger ou pas, décevoir ceux qui comme moi sont amateurs de beaux faisceaux ultra-étales surtout exigés au théâtre. Chez Claypaky il y a justement les Scenius Profile et Spot qui répondent à cette caractéristique. L’Unico les bat par sa grande plage de polyvalence et demeure un vrai Spot de qualité avec un très beau flux…
Zoom / focus / ça joue comment et il ressemble à quoi ce rayon ?
Alors pour ce qui est du zoom, il faut dire ce qui est, il est top. Un peu déconcertant au début avec ses 4 paramètres mais une fois qu’on a fait joujou avec, on a pigé le truc. En fait, il est classiquement constitué de deux paramètres (Zoom et Focus), l’un pour l’ouverture, et l’autre pour la mise au point, mais il est complété par deux paramètres « d’Autofocus » dont le réel intérêt m’échappe un peu…
Bref, passée cette énigme, on a un zoom de 5° à 55° remarquable qui donne un boulet incroyable en mode serré (un bâton de ouf) et un faisceau tout aussi remarquable en ouverture max. Sur Le Scenius Unico, on ne passe pas par un « zoom mode » comme sur les machines « hybrides » pour faire soit du beam, soit du spot. On a un faisceau qui va de l’un à l’autre de manière linéaire, dans la continuité. Pas de limite optique à l’un ou à l’autre. Tous les effets peuvent être joués sur n’importe quel faisceau, qu’il soit ultra-ouvert ou ultra-fermé.
On peut simplement regretter une légère aberration optique qui vient parasiter un peu le faisceau en mode ultra-serré avec un focus assez long, provoquant une légère auréole large autour de la sortie mais reconnaissons que c’est un cas un peu extrême.
Le focus est vraiment efficace, et sa plage de fonctionnement, combinée à celle du zoom permet de nous conforter encore sur le côté malléable de ce faisceau.
Rien qu’en jouant sur la focale, on arrive à obtenir des faisceaux différents et à leur donner certains aspects tout à fait sympas allant du net jusqu’à des « flous partiels » (genre haut du faisceau, bas du faisceau, net spot mais flou beam…), bref, si on y passe un peu de temps, on découvre des tas de trucs ! Je connais quelques lighteux à l’esprit un peu torturé aimant le chipotage et l’expérimental qui vont s’amuser des nuits entièèèèères avec ça !
Et ce n’est pas tout, bien sûr, car n’oublions pas les deux frosts, dont l’un est très léger et permet juste de flouter un peu les gobos, mais l’autre… L’autre, combiné avec notre fameux « zoom de la mort hors normes » nous donne des faisceaux au bord diffus stupéfiants.
Oui et puis, on a un iris aussi… N’oublions pas l’iris, surtout ! Je n’ai pas besoin de détailler tout ce qu’on fait avec l’iris dans ce type de config ? Non hein. On peut juste signaler qu’il est très rapide (les effets de « pulse » sont de toute beauté) et qu’il permet encore d’affiner le beam au besoin, pour passer du « bâton » à la « brindille » intense et musclée (au prix de quelques lumens bien sûr…).
Ô couleurs, mes belles couleurs…
La trichromie du Scenius Unico est très réussie, comme celle de toute la gamme Scenius d’ailleurs. Toutes les couleurs sont impeccables, le mixage est remarquable. Les couleurs complémentaires offrent des teintes pleines franches et lumineuses.
On peut notamment signaler des teintes de bleu et de rouge absolument superbes et suffisamment bien équilibrées pour pouvoir être jouées côte à côte en effets de « passe-passe ». Le CTO est fidèle à ce que l’on attend maintenant sur une machine Claypaky depuis quelques années : au top !
Couleurs sur faisceau spot
Couleurs avec frost
Gobos & textures de faisceau
Dans l’Unico, peu de gobos, une seule roue de 6. Oui mais ça suffit pour la plupart des cas. Au cas où, ils sont montés sur barillet extractible vous permettant de les sortir de leur support juste en tirant dessus, pour pouvoir les remplacer tranquillement et venir les repositionner en une fraction de seconde dans leur logement sur la roue. Ça, c’est au cas où vous voulez installer du gobo perso car les gobos livrés d’origine avec la machine sont particulièrement intéressants et polyvalents. On peut quasiment tout faire avec. Ils sont bien entendu indexables et tournants dans les deux sens.
On peut signaler aussi la présence d’un septième gobo, en réalité la roue d’effet, qui est constituée d’un gobo de type « break-up » en perpétuel défilement linéaire.
Mais pour le coup, point de verrerie imbittable ou quelconque effet dont finalement peu de monde se sert. Il s’agit réellement d’un gobo exploitable, et que nous avons pu animer d’une façon toute particulière. Un bon point aussi !
En tout cas, à projeter ou pour modeler le faisceau, l’Unico est très bien équipé. Petit rappel de la présence des frosts « doux » et « dur » pour venir flouter tout ça à volonté, et la possibilité d’insérer un jooooli prisme à 4 faces pour démultiplier les joooolis gobos en fixe ou en rotation. Bravo !
Les couteaux ! Coupons ! Coupons !
Le système de couteaux du Scenius Unico ressemble fortement à celui du Scenius Profile Il est capable de cadrages d’une d’extrême précision comme d’effets très très rapides. Ses 4 couteaux (huit paramètres) peuvent se positionner à souhait dans le faisceau d’un bout à l’autre sur la totalité de la fenêtre optique. Il y a peu de limites pour cadrer quoi que ce soit avec ces 4 lames…
On peut juste signaler que le focus n’est pas absolument net sur les 4 couteaux en même temps (on est dans le domaine du chipotage extrême… Mais bon…) car pour fermer totalement le faisceau et obtenir ces effets de couteaux à grande rapidité, on a obligatoirement des plans légèrement décalés. Tout l’assemblage du module de couteaux peut pivoter sur 90° pour permettre de se présenter sous l’angle souhaité (un neuvième paramètre.) dans le faisceau.
Le positionnement, le déplacement
L’Unico est une grosse bécane, et malgré ça, sa tête a tout de même une belle vivacité. Le Pan, davantage que le Tilt, a une vitesse de déplacement vraiment satisfaisante sans être comparable bien sûr à celle d’une toute petite lyre. C’est vraiment très très bien.
Les déplacements lents sont fins et limpides, les déplacements rapides sont relativement nerveux, tant que vous ne cherchez pas à obtenir l’énergie de mouvement d’un Sharpy ou d’un Mythos, ça le fera sans problème. Fait-elle du bruit ? Non.
Et en live, ça donne quoi ?
Pour mon essai « en live », je me suis retrouvé dans un concert d’un artiste dont je signe la lumière, et j’ai eu un kit de 12 Unico au milieu d’un ensemble de Sharpy, de Wash Robin 600 et d’une face réalisée avec des Colorspot 1200 AT. Le kit de sol était amené par nos soins et constitué de Mythos et de B –Eye K20.
Les Unico ont ici été utilisés en remplacement des Mythos et de lyres Spot qui sont habituellement réparties sur deux ponts à contre-jour. La disposition correspond à peu près à mes besoins et je n’ai pas eu trop de mal à retrouver mes petits. En remplacement d’un Mythos ou d’un Viper, ça marche. Seule mauvaise surprise, la librairie de la GrandMA2 pour l’Unico ne doit pas encore être tout à fait au point. Mes valeurs d’amplitudes Pan et Tilt étaient complètement exagérées et j’ai dû bricoler un peu pour conformer tout ça aux besoins de mon show.
On peut donc parler de ce que permet cette machine en termes de puissants faisceaux de contre-jour, aussi bien pour du jeu en mode serré de type « beam », ou en effet plus large de type « spot ». Dans tous les cas, la machine s’en sort vraiment très très bien et offre exactement ce qu’on en attend. Il y a de la puissance, de l’effet et la machine est rapide et vive (moins qu’un Mythos, mais la tête est tout de même nettement plus lourde à déplacer). En mode « beam » ultra-serré, le faisceau est tout de même différent de celui d’un Sharpy ou d’un Mythos car sa base est beaucoup plus épaisse en diamètre.
Mais le « bâton » de lumière est bien percutant, très concentré, et permet des effets très très impressifs. En mode spot, tant en faisceau « pur » qu’en faisceau sculpté par des gobos, ses capacités d’éclairement sont remarquables et la richesse de ses effets (la roue d’effet notamment), offre des possibilités réellement séduisantes.
Les ouvertures de zoom sur un gobo de type « passoire » se sont révélées vraiment très très jolies (avec un lever de faisceau en TILT sur quelques secondes ça peut même être très beau !), Le Frost dur permet aussi de très beaux nappages et en complément de l’énorme plage du focus assure des jeux de faisceau très malléables.
Bien qu’il fût parfois difficile d’obtenir un brouillard impeccable (nous étions sur une scène en extérieur, très exposée au vent.), j’ai vraiment pu apprécier les excellents résultats fournis par l’optique de l’Unico et c’est une machine avec laquelle j’aurai de nouveau un grand plaisir à travailler.
En conclusion
Le Scenius Unico est une vraie belle machine polyvalente qui dispose d’atouts sérieux pour réaliser de puissants effets ou fournir toute la lumière que pourra attendre un éclairagiste dans toutes les applications voulues d’une machine puissante.
Pour de la face, pour du contre-jour, pour du sol, pour de la douche, pour de la projection, pour de l’effet de gobo, pour du beam violent, pour du nappage de couleur, etc. et on peut passer de « tout l’un » à « tout l’autre » directement. J’attends avec impatience de le retrouver en live.
D’autres informations en visitant le site Claypaky et le site Dimatec
Les tableaux
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